« Sfarad » ou les rêves de Lalla Soulika est un spectacle de musiques, danses et chants mis en scène par Myriam Tara Benharoch au Comedia ce dimanche 5 février. Un témoignage émouvant de ce que fut la grande époque d’Al Andalous où les trois religions du livre coexistaient paisiblement. Toulon
Sfarad à la rencontre de la musique judéo-espagnole. Photo DR L’utilisation de l’article, la reproduction, la diffusion est interdite – LMRS – (c) Copyright Journal La Marseillaise
La période Al Andalous au Moyen Age a connu une longue époque (711-1492) de paix religieuse en particulier lorsque l’Islam des Almoravides protégeait chrétiens et juifs dans une civilisation unique et syncrétique, véritable modèle de tolérance pluraliste. C’était le temps d’Averroès. De cette paix civile et religieuse est née une civilisation originale mêlant ses diverses influences et débouchant sur un art musical et poétique d’une grande richesse.
La musique, la danse et la poésie y ont donné leurs plus belles fleurs. A partir de la vie tragique d’une jeune juive marocaine Lalla Soulika convoitée, et persécutée puis finalement exécutée au XIXème siècle, la jeune chorégraphe Myriam Benharoche a composé un spectacle magique. Il fait revivre ce mélange de culture autour d’une guirlande de chants d’amour et de danses orientales.
Cette jeune Soulika a réellement existée. De son vrai nom Sol Hachuel (Tanger 1817-Fès 1834) elle aurait été dénoncée pour apostasie de l’Islam alors que semble-t-il elle ne s’est jamais convertie. Condamnée, elle est décapitée sur la place de Fès malgré les marques de protestations de toute la population. Elle a inspiré de nombreux artistes, peintres, dramaturges.
Un hommage aux chants sépharades
Sur scène, la jeune héroïne rêve de ce qu’aurait pu être sa vie, imagine le mariage qu’elle aurait pu avoir, se rappelle la vie familiale et religieuse, songe aux pays de la diaspora, associe sa voix et son corps à ceux des femmes qui ont transmis la mémoire d’Al Andalous dans les chants judéo-espagnols.
La gestuelle stylisée rend à ces mélodies leur sensuelle beauté et leur grave simplicité, des extraits déclamés donnent vie aux pensées de cette figure emblématique du judaïsme marocain. Les animations vidéo d’Isoline Favier évoquent son Maroc natal et poétisent ses contemplations. Mais surtout ce sont les chants séfarades qui magnifient le spectacle, plaintes des exilés d’Espagne, transmises et enrichies de siècles en siècles par les communautés nées de cette diaspora, et plus largement, musiques profanes ou liturgiques des juifs orientaux.
D’une rare beauté émotionnelle, on comprend qu’ils ont pu souvent inspirer de grands compositeurs comme Ravel, Tárrega ou Manuel de Falla. Sfarad est en fait le premier spectacle de danses sur des « romances » judéo-espagnols. Pour cette création, Myriam Tara s’est entourée de solides spécialistes comme Yaël Morciano, talentueuse interprète de ce répertoire, ainsi que de la danseuse Adeline Lopez et de quatre musiciens, Charles Rappoport, Gheorghe Ciumasu, Gilles Finzi et Bernard « Benji » Fellous. A voir pour comprendre que les cultures peuvent, comme les hommes, vivre ensemble.
Jean-François Principiano
Sfarad les rêves de Lalla Soulika par la Cie Maalma ce dimanche 5 février 16h à l’Espace Comedia 10 rue Orvés Le Mourillon Toulon (83).
Fuente: lamarseillaise.fr