Cercle de Généalogie Juive de Grance – Monde séfarade: Nouvelle publication: Ketubbot de la Nation juive de Livourne 1626-1890

Le Cercle de Généalogie Juive de Grance vient d’éditer un ouvrage qui intéresse toute la communauté séfarade.

Il s’agit du relevé et la traduction de toutes les Ketubbot de la communauté juive de Livourne entre 1626 et 1890, soit près de 6800 ketubbot…

Le livre est bilingue, français-anglais et nous avons enregistré un certain nombre de commandes du Canada.

L’ouvrage vient de recevoir le « Outstanding publication Award » du « International Association of Jewish Genealogical Societies ».

Nous joignons à ce mail plusieurs informations.

Lien pour commander : https://www.genealoj.org/fr/boutique/registres-ketubbot-nation-juive-livourne-1626-1890

Pour vous donner une idée, vous pouvez voir l’interview de Liliane et Alain Nedjar sur AKADEM :

http://akadem.org/magazine/magazine-culturel-2019-2020/les-juifs-livournais-des-tunisiens-pas-comme-les-autres/19065.php


Le International Association of Jewish Genealogical Societies» (IAJGS) organise la plus importante manifestation de Généalogie juive dans le monde.

Nous avons le plaisir de vous annoncer qu’à l’occasion de la 40ème Conférence internationale de généalogie juive, le prestigieux «Outstanding Publication Award» (prix de la publication remarquable) a été attribué à Alain Nedjar, Gilles Boulu, Liliane Nedjar et Raphaël Attias pour leur ouvrage : «Registres de ketubbot de la Nation juive de Livourne».

Vous pouvez vous procurer l’ouvrage en cliquant sur le lien suivant : https://www.genealoj.org/fr/boutique/registres-ketubbot-nation-juive-livourne-1626-1890


Alain Nedjar, Gilles Boulu, Liliane Nedjar & Raphaël Attias
REGISTRES DE KETUBBOT DE LA NATION JUIVE DE LIVOURNE (1626-1890)

PRÉFACE
par Michel Gasperoni
Historien, chargé de recherche au CNRS

Un grand pas en avant pour l’histoire des Juifs de Livourne

Livourne constitue certainement une expérience politique et économique horsnorme à l’époque moderne. Lorsqu’à l’extrême fin du XVIe siècle, le grand-duc Ferdinand Ier de Médicis accorda aux marchands « de toutes nations » (et en particulier aux marchands juifs) une série de privilèges garantissant tant la liberté d’installation et d’entreprendre que celle de conscience et de culte, la ville n’était encore qu’un petit port sans importance. Livourne connut rapidement une croissance démographique et économique remarquable, jusqu’à devenir l’un des ports les plus importants de Méditerranée. Alors que des ghettos furent institués dans de nombreuses cités du centre et du nord de la péninsule italienne, à Venise d’abord (1516), suivie de Rome et Ancône (1555), puis de Florence et Sienne (1571), Livourne devint progressivement une véritable « oasis » (1) pour les juifs. Au contraire de Florence ou encore de Sienne, aucun ghetto ne fut en effet institué à Livourne.

L’histoire exceptionnelle de Livourne et de sa, ou plutôt ses populations juives, a bien entendu suscité l’intérêt des historiens, qui lui ont consacré de nombreux travaux depuis près de trente ans, et certains d’entre eux ont largement contribué au renouvellement historiographique plus général. C’est dire à quel point cet ouvrage, écrit par Alain Nedjar, Gilles Boulu, Liliane Nedjar et Raphaël Attias, est fondamental, non seulement pour les érudits et les généalogistes, qui y trouveront d’innombrables et précieuses informations concernant les familles juives livournaises, mais aussi pour les historiens du judaïsme italien et méditerranéen.

L’histoire de la famille a pendant longtemps été une porte d’entrée, voire une clé de lecture de l’historiographie juive italienne. Pour étudier les dynamiques internes des sociétés juives, leur cadre de vie économique et sociale, les mobilités et les migrations, les pratiques religieuses ou encore les phénomènes de conversion et les rapports avec la société majoritaire, la reconstitution des liens et des relations de parenté est en effet primordiale. Toutefois, les sources ne sont pas toujours accessibles. Éparpillée, composite et souvent lacunaire, la documentation d’archives concernant les populations juives est aussi riche que sous-employée, et en particulier lorsqu’il s’agit de sources produites par les communautés elles-mêmes. Si les historiens ont su très largement exploiter les archives notariales, qui regorgent d’actes permettant de reconstituer tant les familles que leurs trajectoires (dots, inventaires post mortem, testaments, divisions des biens, etc.), les sources juives, qui nécessitent des compétences linguistiques et paléographiques particulières, ont encore beaucoup de secrets à
nous livrer. Cet ouvrage, construit à partir et autour des registres de ketubbot de la Nation juive livournaise conservés à l’Archivio Storico della Comunità Ebraica di
Livorno pour une période couvrant plus de deux siècles, en est un parfait témoignage.

Il convient d’emblée de dire que ce livre, qui s’appuie sur un corpus documentaire incroyablement riche et sans équivalent en Italie et en Europe pour la période moderne, représente un travail titanesque et, à l’image de la communauté qu’il se propose d’étudier, hors norme. Titanesque, d’abord, car les auteurs ne se sont pas contentés – ce qui en soit aurait déjà été une véritable performance – de transcrire et de traduire l’intégralité des actes de ces registres (rédigés en hébreu), mais bien de nous transmettre la mémoire de ces familles, et
des pans tout entiers de leur histoire. Hors norme, ensuite, parce que les quatre auteurs, qui ont travaillé sans relâche et en équipe, se sont mués en archivistes-paléographes, en traducteurs, en philologues, en généalogistes et en historiens tout à la fois. Ils se sont attachés à restituer et à analyser le contexte historique dans lequel vivaient les familles appréhendées à travers ces extraordinaires registres de ketubbot, registres qu’ils décortiquent minutieusement et avec pédagogie, ce qui n’est pas rien. En effet, si les ketubbot sont des sources bien connues des historiens, rares sont les travaux prenant la peine d’expliquer à la fois leur contexte d’élaboration, leur forme et leur contenu.

Les auteurs produisent également différentes données statistiques, donnant à voir le rythme et l’évolution des mariages dans une communauté très particulière comme celle de Livourne. Les données qu’ils fournissent constituent un véritable apport historiographique et anthropologique dans la mesure où les comportements matrimoniaux et démographiques des juifs restent encore assez mal connus à grande échelle : ainsi, si des études se sont attachées à reconstituer les trajectoires et les pratiques de certains familles ou groupes familiaux, nous manquons cruellement d’enquêtes globales permettant par exemple de mesurer les mobilités, l’endogamie intrafamiliale ou encore la nuptialité dans les sociétés juives de l’époque moderne. Les tableaux fournis en annexe constituent ainsi une source inépuisable pour étudier la saisonnalité des mariages, le marché matrimonial juif livournais, l’évolution du montant des dots que recevaient les épousées, ou encore de reconstituer les généalogies des familles.

Les généalogies et les itinéraires familiaux font l’objet d’un chapitre entier, qui permet de suivre au plus près et sur plusieurs siècles les trajectoires de trente familles juives livournaises. À la lecture de ces fiches prosopographiques particulièrement riches et utiles, on découvre combien ces familles vivaient au rythme de la Méditerranée, au Nord comme au Sud, à l’Ouest comme à l’Est, qui font de Livourne un véritable hub et une passerelle connectant l’Occident chrétien et l’Empire ottoman. Les juifs livournais apparaissent ici comme des acteurs et médiateurs culturels et commerciaux centraux en Méditerranée.

Enfin, les auteurs nous livrent un véritable « dictionnaire onomastique » de la communauté juive livournaise. Ce dictionnaire se veut tout sauf descriptif, puisqu’il nous raconte en détail l’histoire et l’évolution des noms et des prénoms, tout en nous donnant des outils tout à fait efficaces pour mieux naviguer à travers l’univers anthroponymique juif livournais et, au-delà, italien, sépharade et méditerranéen. Nous ne pouvons donc que nous réjouir que l’anthroponymie et l’onomastique, sciences connexes ayant occupé une place importante dans l’histoire et l’historiographie juive dans la plupart des pays européens, aient été placées au cœur de cet ouvrage, là encore avec une clarté et un souci pédagogique peu communs.

Auteurs d’un ouvrage remarqué sur « la communauté juive portugaise de Tunis dite livournaise ou Grana » (Paris, Cercle de Généalogie juive, 2015), Alain Nedjar, Gilles Boulu, Liliane Nedjar et Raphaël Attias récidivent avec un travail colossal et de portée internationale sur Livourne. Ce livre possède tant de mérites qu’il convient désormais de laisser au lecteur impatient le plaisir de pouvoir s’y plonger avec passion et intérêt. Fruit d’une intelligence collective remarquable, cet ouvrage force l’admiration par sa rigueur méthodologique et
par sa générosité ; par sa volonté de la rendre accessible à un large public, non seulement grâce à un style extrêmement pédagogique et précis, mais aussi au choix de promouvoir un bilinguisme, français et anglais, qui lui permettra sans aucun doute de voyager autour du monde comme voyageaient jadis ces marchands juifs qui, partant de Livourne, sillonnaient la Méditerranée jusqu’aux confins de l’Asie.

1 Nous empruntons l’expression à Attilio Milano, Storia degli ebrei in Italia, Torino, Einaudi, 1992, p. 322-328.

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